Rachidia : 90 ans d’histoire et de renaissance du patrimoine musical tunisien

La Tunisie célèbre un événement majeur : les 90 ans de la Rachidia, institution emblématique dédiée à la préservation du malouf, l’une des expressions musicales les plus profondes de notre identité culturelle.

Rachidia : 90 ans d’histoire et de renaissance du patrimoine musical tunisien

Créée en novembre 1934, dans le sillage du Congrès de la musique arabe du Caire en 1932, la Rachidia s’est imposée comme un rempart essentiel à la sauvegarde du patrimoine musical tunisien, à travers l’enseignement, la recherche, l’archivage et la transmission.

Une semaine entière de festivités a marqué cet anniversaire : conférences, expositions, rencontres et surtout le lancement du site officiel de la Rachidia (rashidiyya.tn) véritable trésor numérique regroupant plus de 7 600 documents historiques : archives sonores, enregistrements, images, manuscrits et articles.
Une plateforme inédite qui permet enfin d’accéder à l’immense mémoire du malouf et de l’institution.

Zied Mehdi : “Le malouf, c’est notre identité. Le oud tunisien en est la colonne vertébrale.”

Invité par Abir Fares dans ART DE VIVRE, Zied Mehdi, fondateur de Dar El Oud Ettounsi – دار العود التونسي, revient sur l’importance de cet anniversaire et sur la singularité du malouf tunisien.
Il retrace l’histoire du oud tunisien, instrument central de la tradition, et en explique les spécificités : une caisse plus petite, des proportions uniques, une structure interne différente, un timbre distinctif et une manière de jeu très particulière.

Ce qui distingue le oud tunisien, rappelle-t-il, ce n’est pas seulement sa forme, mais aussi son rôle historique : « Dans les orchestres traditionnels, c’est le luthiste tunisien qui menait la troupe. Le oud n’était pas qu’un instrument : c’était la mémoire vivante du malouf. »

Zied Mehdi revient également sur son propre parcours : une passion née à l’adolescence, nourrie par de longues heures d’apprentissage, de recherche et d’immersion dans les archives sonores des maîtres tels que Taher Gharsa et Ziad Gharsa.
Faute d’école dédiée, il a d’abord appris seul, en analysant les enregistrements historiques, avant de fonder Dar El Oud Ettounsi : un lieu de transmission, de recherche et de fabrication d’instruments, inspiré des modèles les plus anciens – notamment ceux conservés au Horniman Museum de Londres.

Entre finance et musique : un parcours guidé par la passion

Même s’il est issu du monde de la finance, Zied Mehdi rappelle que la musique a toujours été une part essentielle de son identité.
Son amour pour la médina, pour l’artisanat et pour les traditions sonores a fini par converger dans un projet unique : redonner au oud tunisien la place qu’il mérite et offrir aux jeunes un espace pour apprendre, comprendre et transmettre.« Le malouf n’est pas seulement une musique, c’est un savoir-faire, une manière de penser, une émotion. Quand les yeux brillent et que le cœur bat, le reste devient naturel. »

Un patrimoine vivant qui continue d’inspirer

Grâce à des passionnés comme Zied Mehdi et à des institutions centenaires comme la Rashidiya, le malouf continue d’évoluer, de se transmettre et d’inspirer de nouvelles générations.
Les 90 ans de la Rashidiya ne sont donc pas une simple célébration : c’est un acte de mémoire, mais aussi un engagement pour l’avenir, celui d’une musique profondément ancrée dans l’âme tunisienne.