Exposition BOUCLIERS ETHNO-ZEN D´Insaf SAADA

La galerie Musk and Amber accueillera le vernissage de l’exposition BOUCLIERS ETHNO-ZEN d’Insaf SAADA le jeudi 10 novembre, à partir de 18h.
 

Exposition  BOUCLIERS ETHNO-ZEN D´Insaf SAADA

ci-dessous l’article descriptif de l’exposition par Aicha Filali
Ci-dessous l’article descriptif de l’exposition par Aicha Filali
 

« Hors des modes et des tendances, Insaf Saada trace son chemin esthétique, têtu, circulaire, éternel recommencement. On l’aura compris, entre Insaf et le cercle c’est une histoire qui dure.

Et comme toutes les histoires qui durent, elle évolue et se transforme. Après sept mois de travail quasi quotidien, elle nous révèle les dernières révolutions de son cercle. En tout une vingtaine de pièces présidées par un esprit zen. Car en plus du cercle Insaf est attirée par tous les mysticismes qui permettent de s’élever au dessus du quotidien et des contingences. L’ensemble des oeuvres présentées est plutôt à caractère…protecteur; doublement protecteur. D’abord au niveau de la forme, dans le sens où le cercle, en éternel équilibre instable, est la figure insaisissable par excellence car elle ne comprend aucune protubérance qui permettrait de l’accrocher, de la saisir, de s’en emparer.

Ce travail a un caractère également protecteur du fait de la fonction assignée aux objets réalisés, puisque les oeuvres sont placées sous le signe du bouclier, dont la première définition nous indique qu’il s’agit «d’une grande plaque de métal, ou de cuir, utilisée pour se protéger des coups de l'ennemi». Le ton est ainsi donné, protection et méditation semblent être les maître-mots qui président à l’inspiration de l’artiste pour le présent travail. Ces boucliers, pièces-maîtresses de la collection, sont déclinés par l’artiste selon deux modalités esthétiques essentielles; Tantôt directement « présentés » dans leur intégrité d’objet palpable, tantôt « re-présentés » sur toile.

Pour le premier cas de figure, les « objets » sont présentés sous forme de calotte circulaire en aluminium rehaussé de feuille d’or ou d’argent, auquel l’artiste aura préalablement fait subir un léger traitement graphique, sur le mode de la croix, du triangle, du zellige ou autre ajourage ; et cela en altérant la surface du métal ou en lui appliquant de la couleur.
Pour le second cas, les boucliers sont re-présentés, et se donnent à voir comme des cercles bidimensionnels, figurant sur des toiles au format imposant. Disque cerclé, idée noire en or, carré d’or, oeil d’argent lunaire… tels sont quelques uns des titres évocateurs des oeuvres en question.

S’agissant de placer des cercles dans des carrés, format obligé des tableaux, Insaf se trouve de plain pied dans…la quadrature du cercle. Et revoilà la spiritualité qui pointe à nouveau. Dans la plupart des cosmogonies, le cercle et le carré sont souvent associés, et se déclinent sous forme de dualités telles que le ciel et la terre, le divin et l’humain ou l’âme et la matière. Réaliser la quadrature du cercle est donc une opération symbolique difficile, qui cherche à élever la matière, donc la part animale de l'homme, vers le divin. L’homme de Vitruve de Léonard n’est-il pas une voie pour résoudre la quadrature du cercle ? Inscrire l’Homme dans un carré c’est mettre en évidence son origine terrienne, son aspect matériel et physique. L’inscrire en même temps dans un cercle, c’est rappeler sa nature cosmologique et spirituelle qui le situe au centre de l’Univers.

Non contente d’être en prise avec cette dualité, l’artiste multiplie les appels d’air vers cette quête spirituelle. Ainsi, chemin faisant de son histoire de boucliers, Insaf intègre…un oursin. Petit joyau de la nature, le dollar des sables (ainsi nommé en raison de sa ressemblance avec une vieille pièce de monnaie) évidemment de forme discoïde, a une géométrie radiale qui en fait une des formes les plus parfaites de la nature. L’étoile à cinq branches qui se dessine en son centre fait que sa structure est considérée comme dépositaire du nombre d’Or et de la divine proportion.

La multiplicité des clins d’oeil vers toutes ces références d’ordre mystique semble témoigner de la part de l’artiste d’un désir de lévitation au dessus du monde matériel surtout en regard de l’occurrence que nous traversons.

Il faut toutefois préciser que chez Insaf cet engagement dans le sens de la spiritualité, n’est pas de l’ordre de la déclaration d’intention. Cette ascèse, l’artiste la réalise surtout en empruntant le chemin de l’épure esthétique. Car pour qui connaît le travail de Insaf Saada et son parcours, le présent projet témoigne, malgré l’apparente profusion des matériaux et des textures, d’un sens de la retenue et de l’économie des formes et des couleurs qui est le signe de la maturité et de l’avènement d’un langage plastique spécifique qui gagne en dépouillement et qui fait la singularité de son univers.

Lâcher prise, lévitation, ascèse, levée de boucliers… mais qui est l’ennemi, tapi en nous?

C’est à tout cela que nous convie Insaf Saada dans sa cuvée 2016. A moins qu’il ne soit sacrilège de parler de cuvée dans cette atmosphère nimbée de mysticisme ».